Le choix du jeudi... de Véronique

 Pour ce choix du jeudi, je vous propose de voir ou revoir "Le Roi et l'oiseau" de Paul Grimault, considéré comme le premier film d'animation français et qui aurait inspiré bien des années plus tard  Hayao Miyazaki pour la réalisation de ces films. 


Si une première version est sortie en 1953 sous le titre " La Bergère et le Ramoneur", celle-ci fut réfutée par Paul Grimault en personne, trouvant qu'elle était trop éloignée de son projet initial. 

C'est ainsi qu'après de nombreuses années de tractations avec la justice pour récupérer les droits sur les images existantes, Paul Grimault a réalisé la 2nde version de cette œuvre en 1980, sous le titre "Le roi et l'oiseau". 

C'est cette version que vous trouverez dans quelques jours dans notre rayon DVD. 


En 1953, le paysage des films d'animation se résumait essentiellement à l'univers Walt Disney, et   s'adressait presque exclusivement à un jeune public. 

Voulant rompre avec cet esthétisme qu'il trouvait réducteur, Paul Grimault veut proposer à des spectateurs de tous âges  une fable philosophique. Pour cela il est aidé par le parolier Jacque Prévert dans la traduction du conte de Hans Christian Andersen "La Bergère et le ramoneur", qui servira de point de départ au film et autour duquel l'intrigue s'enroulera. 

" Le roi Charles V et trois font huit et huit font seize règne en tyran sur le royaume de Takicardie". Toute la ville est remplie d'effigies à sa gloire et il n'hésite pas à jeter les importuns et les opposants au régime dans des culs de basse fosses au plus profond des entrailles du palais où les malheureux doivent trimer pour la gloire du roi.

Tout en haut du château, dans ses appartements secrets, il s'entoure de peintures qui prennent vie à la tombée de la nuit. C'est ainsi que la bergère et le ramoneur sortent de leur toile pour s'aimer. Cependant, le roi, jaloux, va tout faire pour les séparer. 

C'est un oiseau moqueur et impertinent, nichant sur une tourelle du palais, qui les aidera à s'enfuir en retournant contre le roi ses propres instruments de rétorsion, dont un robot géant, à mi chemin entre celui du Métropolis de Fritz Lang et celui du Magicien d'Oz de Victor Fleming

 



 Si le scénario de 1980 laisse une part belle à l'histoire d'amour entre la Bergère et le Ramoneur, Paul Grimault développe un second récit qui prend autant d'importance voire plus autour du Roi, personnage mégalomane, perdu dans sa tour d'ivoire et de l'oiseau,  sorte d'esprit libertaire, qui n'a de cesse de condamner les agissements du premier. 

Paul Grimault ne laisse pas le spectateur s'enfermer dans sa zone de confort avec un récit linéaire, mais en appelle à leur réflexion et à leur esprit critique pour les amener à réfléchir sur les thèmes du pouvoir et de ses limites à travers le personnage du roi et de la liberté d'expression à travers l'oiseau

De même, les cinéastes avertis ne manqueront pas de noter quelques clins d’œil aux films de Chaplin ou de Fritz Lang dans les scènes de l'usine de modelage/ peinture et du personnage du robot

Film d'animation avant-gardiste en 1953, "Le roi et l'oiseau" devient un classique du genre, à voir en famille sans modération pour ces nombreux niveaux de lecture. Les plus jeunes aimeront l'heureux dénouement de l'histoire de la Bergère et du ramoneur, tandis que les plus grands seront sensibles aux messages philosophiques.

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